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A quoi ressemblera le bureau post-Covid ?

12/06/2020


Par Loïc Hervé, directeur général délégué chez Perial AM 


La crise liée au Covid-19 met en lumière les révolutions structurelles qui sont à l’œuvre depuis plusieurs années sur le marché des bureaux. Révolution dans la géographie des implantations, révolution dans les temporalités d’usage des bureaux ou encore révolution dans la qualité intrinsèque des immeubles de bureaux et dans l’intégration des critères environnementaux, sociétaux et de gouvernance (ESG) pour l’ensemble des actifs… Cette crise est indéniablement l’accélérateur d’une mutation inéluctable du secteur tertiaire. La création de valeur dans nos métiers ne passera plus seulement par le nombre de mètre carré, mais par les services qui y sont associés.


Consolidation de l’attractivité des métropoles 


Le phénomène de métropolisation ne va pas s’arrêter. Au contraire, les besoins croissants de sociabilisation, de mixité d’usage, d’accès à l’éducation, à la culture, et aux services de santé, poussent à se tourner vers les métropoles qui concentrent en leur sein les moyens financiers nécessaires pour un haut niveau d’équipements que ce soit en termes de connectivité, de transports en commun propres ou de mutualisation des espaces techniques haut de gamme. Ce mouvement ne semble pas pouvoir être inversé par la présente crise : toute personne se trouvant en situation de télétravail contraint dans des zones parfois mal desservies, ou peu connectée, a bien conscience de l’importance de la métropole, ne serait-ce, simplement, pour faire société.


Chaque métropole se renforce d’année en année, et développe de nouveaux transports en commun propres venant redessiner la carte d’attractivité des zones d’implantation des bureaux. Il devient difficilement envisageable d’investir dans des bureaux situés à plus de dix minutes à pied d’une station de transport « lourd » de type tram, bus en site propre, métro, etc, alors que dans le même temps, de nombreuses alternatives au mass transit se développent au travers des mobilités douces. Le bureau en tant que hub a un rôle à jouer en s’interconnectant à ce réseau de transports pluriels. Seule la métropole peut permettre cette densité d’offre.


La demande locative se concentre par ailleurs massivement sur les centres urbains déjà établis et offrant une véritable mixité d’usage. Les zones à usage exclusif de bureaux sont de moins en moins désirables, malgré la qualité des services offerts aux occupants pouvant compenser ce manque d’attractivité. Une géographie du bureau à deux vitesses s’installe durablement. Les écarts importants dans les taux de vacances par zones avant la crise illustraient déjà ce phénomène.


Les plus jeunes renforcent ce mouvement, plus de la moitié d’entre eux estiment que l’emplacement de leur bureau est critique dans leur choix d’entreprise, et veulent travailler et vivre en centre urbain.


Avant la crise liée au Covid-19, la guerre des talents faisait rage en particulier dans le secteur du IT, poussant les entreprises à investir de plus en plus les Central Business District (CBD) ou les premières couronnes mixtes, très bien connectées. La crise va entraîner de nombreuses suppressions d’emplois, mais tous les secteurs ne seront pas touchés de la même façon, notamment avec des résistances dans le secteur du digital au sens large, devenu crucial à la lecture de cette crise sanitaire inédite.


Le bureau comme hub social 


La crise met en exergue un deuxième phénomène qui se dessinait déjà dans de nombreuses entreprises et qui s’étend à l’ensemble du secteur tertiaire, à savoir un temps de travail réparti en trois temps :


- le home office pour réaliser notamment toutes les tâches processées et s’intégrant dans un management par objectifs ;

- le bureau comme lieu destiné à assurer la cohésion de l’entreprise, la créativité de ses membres et leur sociabilisation ;

- le nomadisme pour un certain nombre de fonctions, entre les déplacements chez les clients, sur des chantiers, etc, et le travail dans des tiers lieux relais, centre de coworking, ou tout simplement dans les transports, afin d’optimiser les déplacements et le temps de travail, et répondre à une demande de temps d’occupation plus court et plus incertain.


Environ la moitié des entreprises du secteur tertiaire dont l’activité le permettait expérimentait ou avait déjà adopté le télétravail avant-crise, et la quasi-totalité l’a appliqué totalement pendant le confinement quand la poursuite de l’activité à distance était possible. C’est indéniablement une révolution du travail qui s’opère avec l’émergence du home office, qui au demeurant va questionner la structuration des logements.


Pour autant, de très nombreux salariés et chefs d’entreprise aspirent à revenir au bureau même partiellement, à partager, à échanger, à sociabiliser. Il serait illusoire d’imaginer le bureau disparaître, il apparait au contraire plus que jamais le socle indispensable à la structuration du projet d’entreprise et au sentiment d’appartenance des collaborateurs.


Le bureau devient un hub, un espace de créativité, de structuration de la stratégie de l’entreprise, d’expérimentation, de célébration des succès. Plus que jamais il fait sens, et les entreprises doivent le valoriser en partenariat avec leurs bailleurs, investisseurs et gestionnaires.


Le tout-travail au bureau est sans doute en voie de disparition progressive. Pour autant, ce phénomène va-t-il engendrer une demande bien plus faible en mètre carré ? Rien n’est moins sûr…


Du smart building au safe building 


L’avenir du bureau passe par une politique de RSE sans équivoque pour l’ensemble des entreprises et en lien profond à leur raison d’être telle que définie par la loi Pacte. L’action immobilière doit être tournée vers l’utilisateur final, vers la communauté, vers les territoires.

L’emplacement des bureaux est essentiel pour le bilan carbone et pour l’attractivité des entreprises.


La sobriété des bâtiments et leur raccordement à des sources d’énergie verte deviennent des pré requis. La fin de la civilisation carbonée est proche, les actuels prix bas de l’énergie fossile ne doivent pas nous détourner de l’objectif d’une société décarbonée à horizon 2050.


Nous évoluons du smart building au safe building. La capacité des bâtiments à offrir un environnement sain, de nature à agir positivement sur la santé des occupants devient obligatoire, l’approche par le bien-être va devenir la norme.

La qualité des services fournis au sein du bâtiment, ainsi que la porosité avec l’univers de services autour de l’immeuble sont une des clés de l’attractivité pour les utilisateurs.


Enfin, le caractère inclusif de l’immobilier devient peut-être un des enjeux les plus importants dans le monde instable dans lequel nous évoluons. La société est effectivement de plus en plus clivée et la crise risque d’accentuer encore les inégalités.


L’immobilier en ce qu’il crée notamment du bien-être pour les utilisateurs, de la sociabilisation, de la réassurance et de la protection vis-à-vis des agressions extérieures a un rôle très important à jouer sur l’équilibre de ses occupants et sur le vivre-ensemble.


Loin du repli sur soi mortifère, le bureau est un lieu qui permet de brasser des origines diverses, des conditions diverses au sein d’une entité qui permet de faire société, qui créée des solidarités et qui mobilise les énergies autour d’un projet commun.


Le bureau inclusif doit d’ailleurs être accompagné par un logement inclusif, et par la création d’une offre locative abordable qui accompagne les entreprises sur les territoires qu’elles ont choisis. L’immobilier est un formidable outil pour lutter contre une société traversée par des courants discriminants.

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